Une jurisprudence pour être enterré avec son animal

Le chien Félix est à l’origine d’une jurisprudence interdisant d’être enterré avec son animal de compagnie. Il existe des possibilités pour être inhumé avec son compagnon, tout en respectant la loi. Le sujet peut paraître choquant, toutefois de nombreux maîtres en expriment le souhait.  

Etre enterré avec son animal ?

La question peut se poser, d’autant que l’animal de compagnie, chien ou chat, fait désormais partie de la famille. Il est bien souvent d’ailleurs le seul compagnon d’un maître. 

Aussi, certains émettent la volonté d’être, le moment venu, enterré avec leur animal. Cela est même exprimé par des maîtres qui sont parvenus à faire le deuil de leur animal. 

En France, contrairement à d’autres pays, la loi interdit l’inhumation d’un chien ou d’un chat dans un tombeau où repose un humain (ou plusieurs). En Angleterre, il existe des cimetières pour animaux où ils peuvent reposer avec leurs maîtres. La Suisse (allemande et romande) le permet également. 

La « jurisprudence Félix » a interdit l'inhumation du chien dans le tombeau familial

Il faut remonter à 1959 pour trouver les raisons de cette interdiction en France. Le 1er février de cette-là, M. et Mme Blois, les maîtres de Félix, ont à faire face à la disparition de leur chien. Comme Félix pèse moins de 40 kg et, donc selon le Code rural, ils ne leur pas été fait obligation de remettre la dépouille du chien à l’équarisseur, comme cela était la règle alors. Le chien pouvait être enterré dans un jardin (ce qui est toujours possible de nos jours en respectant certaines obligations). 

Mais les maîtres de Félix, très attachés à leur chien, souhaitent qu’il repose dans le caveau familial. Ils formulèrent donc une demande en ce sens au maire de leur commune, Artigues-de-Lussac (Gironde). Le maire accorda verbalement cette demande. 

Un chien enterré en toute discrétion

C’est en grande discrétion que l’enterrement de Félix eu lieu, en seule présence des maîtres et d’un fossoyeur. Mais les habitants de l’endroit en ont eu rapidement connaissance. 

Les réactions n’ont pas tardé à se manifester et deux camps se sont formés : les « pour » et les « contre ».

Une affaire qui a fait grand bruit

L’affaire a pris une telle ampleur que le maire en est venu à annuler par écrit l’autorisation qu’il avait concédée. Et il demanda que Félix soit déterré du caveau familial. 

Face à l’inaction des maîtres, le maire a pris un arrêté les sommant d’exhumer le cadavre de Félix sous une quinzaine de jours. Face au refus des époux Blois, le mari fut déféré au tribunal de police de Libourne. 

Tant et si bien que cette affaire qui aurait pu passer inaperçue est finalement remontée jusqu’au… Conseil d’Etat ! Lequel ne donna pas un avis favorable (arrêté du 17 avril 1963). 

Des juristes s’en mêlèrent aussi. « La présence dans un cimetière du corps d'un chien est une insulte à la dignité des morts qui y ont leur sépulture », a indiqué pour sa part Paul Esmein, professeur à la faculté de droit de Paris. Des raisons religieuses ont par ailleurs également été évoquées. 

Placer les cendres du chien ou du chat dans une urne

Malgré la décision du Conseil d’Etat, certains ont soutenu le fait qu’après incinération, les cendres d’un chien pouvait, dès lors qu’elles étaient contenues dans une urne, être placées aux côtés d’un corps humain. 

C’est donc la possibilité qui pourrait s’offrir aujourd’hui encore à ceux qui exprimeraient dans leurs volontés d’être enterré aux côtés de leur animal. La loi autorise en effet que des « objets » puissent être placés aux côtés d’une dépouille. Une urne contenant des cendres d’un animal est considérée comme un objet. 

A noter aussi le fait que dès lors que l’on dispose d’une propriété privée, le code de l'administration communale peut autoriser l’enterrement de personnes (à plus de 35 mètres de l’enceinte d’une ville , village ou bourg). Dans ce cas, la « jurisprudence Félix » ne s’applique pas (l'acteur Alain Delon a par exemple prévu d'être enterré avec ses chiens et chats).

La loi interdit depuis 2008 de garder chez soi les cendres d'un défunt. Celles-ci doivent obligatoirement être conservées ou dispersées dans un endroit approprié. Elles peuvent donc être enterrées dans une propriété privée. Dans tous les cas, une demande préalable auprès de la préfecture doit être faite. 

Des maîtres qui passent outre la loi

Les décisions administratives formulées à l’encontre de propriétaires souhaitant se faire enterrer aux côtés de leur chien dans un cimetière animalier se compteraient par centaine. Et, malgré la loi interdisant d’être enterré avec son animal, certains maîtres sont passés outre le texte en vigueur. 

Avec le consentement de proches, ce vœu qui leur paraissait si cher a pu être respecté… sans que cela ne se sache en dehors de ceux qui y ont participé. 


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Photo : 123RF