Claude Pacheteau

Les vétérinaires sont-ils vraiment des « privilégiés » ?

Vétérinaires, mais aussi avocats, huissiers, pharmaciens… sont dans le collimateur du ministre de l’Economie et du Redressement productif. Arnaud Montebourg entend en effet de s’attaquer à ces professions réglementées bénéficiant d’un statut particulier au motif que ces métiers (37 au total) ont un niveau de rentabilité élevé. 

Arnaud Montebourg , ministre de l’Economie et du Redressement productif ,veut faire baisser jusqu'à 20% les prix des services de 37 professions parmi lesquelles les vétérinaires. Une telle baisse permettrait selon le gouvernement de dégager près de 6 milliards d'euros de pouvoir d'achat pour les ménages

Les privilèges dont jouissent ces professions dites réglementées sont jugés particulièrement avantageux. 

Selon un rapport de Bercy, le bénéfice moyen de ces professions qui disposent d’un ‘’monopole’’ est en hausse de 46% entre 2000 et 2010.  

Les vétérinaires cités dans un rapport, mais loin d'être les plus concernés 

Les vétérinaires n’apparaissent pourtant pas parmi le Top 12 de la liste des professions dont les revenus moyens annuels (en 2010) apparaissent comme faisant partie des plus élevés selon le rapport de l’Inspection générale des finances. En tête, ce sont les notaires, les huissiers de justice, les pharmaciens… pour ne citer que les 3 premiers de ce classement. 

Dans la liste des principales professions libérales réglementées en 2011, en nombre de professionnels, les vétérinaires n’arrivent même pas parmi les 18 premiers ! 

En moyenne en France, pour un chiffre d'affaire de 100 euros on estime le bénéfice net à 8 euros. Il est de 44 euros pour un greffier de tribunal de commerce, 43 euros pour un huissier, 34 euros pour un chirurgien-dentiste, 23 euros pour un vétérinaire ou encore 19 euros pour un agent immobilier.

Des différences de tarifs vétérinaires qui s’expliquent aisément

Certes les vétérinaires sont libres de pratiquer leurs tarifs et ceux-ci peuvent varier d’une région à l’autre. Mais la disparité des tarifs vétérinaires s’expliquent en partie par le fait d’une fiscalité (charges, taxes….) qui n’est pas partout la même. 

Ensuite, la médecine vétérinaire, qui n’a rien à envier à la médecine humaine et fait sans cesse des avancées, fait appel à des technologies de pointe. L’équipement d’un cabinet ou d’une clinique vétérinaire a donc un coût. 

Demander un devis, lorsque l’on n’est pas face à une situation d’urgence médicale, reste aussi tout à fait possible pour le maître souhaitant faire soigner son chien, chat ou NAC. 

Pour ceux qui l’ont choisi, l’assurance santé animale permettra enfin un remboursement des frais à hauteur de la formule choisie. 

Michel Baussier, président de l’Ordre national des vétérinaires, estime que les déclarations du ministre font partie d’une stratégie de communication, visant à contenter l’Union européenne et l’opinion publique. « Ce n’est pas la première fois que nous sommes attaqués et dans le collimateur des politiques », indique-t-il dans les colonnes du Journal de Saône-et-Loire. Des propos qu’il reprendra aussi dans une interview sur RTL (journal du 12/30 du 15 juillet. 

« Les vétérinaires sanitaires – qui réalisent des missions de santé publique pour l’État –, mal payés, ne gagnent de l’argent que grâce à leur activité libérale. Si on devait mettre des fonctionnaires à leur place, il faudrait que l’État en recrute une énorme quantité », souligne aussi Michel Baussier, alors qu’il estime qu’« on demande presque autant de compétences pour soigner un animal qu’un humain ».

« Les vétérinaires n’ont aucun intérêt à pratiquer des tarifs élevés. »

Un vétérinaire, interviewé par le journal de 20h00 de France 2, est revenu lui aussi sur l’investissement matériel nécessaire à une clinique. Il assure par ailleurs qu’il n’est pas dans l’intérêt pour les vétérinaires de pratiquer des prix trop élevés.

Car bien que le nombre de praticiens soit défini par un numerus clausus (548 places attribuées pour le concours vétérinaire de 2013, contre 468 l’année précédente), la concurrence existe bel et bien. Et qu’un vétérinaire qui pratiquerait des prix trop élevé verrait le risque de perdre sa clientèle. 

Du côté de l’Unapl (Union nationale des professions libérales), le Dr Michel Chassang, président, souligne entre autres  que « les professions réglementées sont une garantie et une chance pour les consommateurs. Les professions réglementées obéissent à des règles déontologiques, lesquelles d’ailleurs proscrivent le recours à la publicité. Ensuite, certaines d’entre elles assument des missions de service public, et d’autres, lorsqu’elles sont conventionnées, pratiquent des tarifs administrés, excluant la concurrence par le prix que voudrait stimuler la future loi ».

A l’Ordre des vétérinaires, on rappelle volontiers aussi qu’ il « faut garder à l’esprit ce que coûtent certains examens pour les animaux comparé à la médecine humaine. Comme par exemple une IRM. Il n’existe pas de sécurité sociale pour les chiens et chats, mais les tarifs d’un tel examens sont bien inférieurs à ceux pratiqués chez un humain, qui lui sera remboursé des frais ». 

Autre exemple parmi d’autres : les frais consécutifs à une hernie discale s’établissent en moyenne à 1 500 € chez un chien, contre 4 000 chez un homme. 

Enfin, le magazine Que Choisir qui avait consacré en 2012 un dossier aux tarifs vétérinaires (n° 500, février 2012) avait fait état d’une constance dans les tarifs vétérinaires : aucune flambée des prix mise en avant comparée à 1997, leur hausse étant inférieure à celle de l’inflation. 

La comparaison des tarifs vétérinaires reste toujours possible, rappelait lui aussi le magazine. « Mais il ne faut pas oublier que choisir un vétérinaire ne se résume pas à sortir sa calculette : c’est aussi une question de confiance »,

Délivrance de médicaments : attaqué sur ce point aussi, l’Ordre des vétérinaires remet les pendules à l’heure

L’Ordre des vétérinaires réagit aux exemples de dérives de l’usage des médicaments destinés aux animaux qui sont évoqués alors que le Parlement examine le projet de Loi agricole d’avenir,

Le Parlement examine le projet de Loi agricole d’avenir. Un texte essentiel, notamment pour la santé humaine et animale et qui concerne les vétérinaires.

L’Ordre national des vétérinaires entend dans un communiqué restituer la vérité des faits face à l’opération de dénigrement initiée contre la profession vétérinaire.

Selon l’ONV, on lui conteste « avec des arguments fallacieux, sa double qualité de prescripteur et de distributeur de médicaments pour animaux que lui reconnait la loi ».

Les vétérinaires de France n’acceptent pas que leur probité soit remise en cause et souhaitent rappeler que l »ors des soins prodigués aux animaux, ils sont amenés à prescrire et à distribuer des médicaments uniquement dans le prolongement de leurs actes, c’est-à-dire après avoir examiné les animaux, établi un diagnostic, éventuellement procédé à une intervention chirurgicale et déterminé quels médicaments sont nécessaires en vue de la guérison ».

La profession vétérinaire condamne fermement « les pratiques déviantes d’usage des médicaments et même d’automédication de certains éleveurs sur leurs animaux [sont en premier lieu visé les élevages de bétails, Ndlr]. Ces pratiques dangereuses pour la santé publique sont hors la loi ».

Dans le communiqué, l’ONV assure encore que « les vétérinaires sont mobilisés depuis des années pour réduire l’utilisation des médicaments au strict minimum. Par exemple, pour les antibiotiques, sans aucune mesure contraignante imposée, ils ont su contribuer en moins de cinq ans à la diminution globale de 25% de leur utilisation chez les animaux d’élevage ».

Vétérinaires : les garants de la santé publique

Enfin, l’Ordre des vétérinaires s’élève contre la publication récente de chiffres erronés concernant les médicaments : « Les vétérinaires n’accaparent pas 95% des ventes de médicaments destinés aux animaux. En fait, la reconnaissance de leurs compétences par leurs clients conduit à ce qu’ils délivrent 66% des médicaments destinés aux animaux, à côté des groupements de producteurs pour 16%, des Pharmaciens d’officine pour 10% et des autres circuits de distribution pour 9%*. »

Et de rappeler enfin que « les vétérinaires ont un rôle de sentinelle sur tout le territoire pour identifier les maladies animales contagieuses, parfois mortelles, qui peuvent se transmettre à l’Homme. La très grande majorité des vétérinaires se dévoue pour la santé des animaux tant de compagnie que d’élevage. En France, 24h/24 et 7j/7, il est possible de trouver un vétérinaire pour prendre en charge un animal malade ou accidenté. »

* source : LegiVeille/Auzalide

 

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